Dynamiques des activités informelles au Maroc : mode de développement, rationalités et réseaux: le cas de la petite confection à Fés

Auteurs-es

Rajaa MEJJATI ALAMI
UNIVERSITE SIDI MOHAMED BEN ABDELLAH
##plugins.pubIds.doi.readerDisplayName## https://doi.org/10.57054/codesria.pub.949

Mots-clés :

activités informelles, Maroc, développement, Fés

Synopsis

L'interet porte a !'existence d'activites liees a des strategies de survie, ainsi qu'une nouvelle problematique developpee autour des petits metiers urbains1 sont a l'origine du concept de secteur informel. En meme temps celui-ci est indissociable d'une reflexion sur "!'evolution de l'emploi et des instruments d'analyse utilises pour l'apprehender"2_ Cette reflexion consiste a reproblematiser, dans le contexte des villes du Tiers-Monde, les modes de developpement fondes sur une adequation entre l'offre et la demande de travail (les modeles de developpement dualistes).

Il est en effet devenu trivial, de nos jours, de considerer Jes activites informelles comme une composante essentielle de l'economie urbaine, representant selon les pays 20 a 60 % de l'emploi urbain. Depuis deux decennies, la notion de "secteur informel"3 (SI) occupe a la fois le champ de l'economie et le vocabulaire mediatique. Elle intervient tout autant dans le domaine operationnel et descriptif que dans le domaine scientifique ou elle surgit, resiste (les autres termes par lesquels on a voulu la remplacer n'ont pas connu la meme perennite) et ou elle est erigee en concept, en depit de son faible pouvoir analytique et theorique. Le role que le suppose secteur joue dans les pays du Sud, ou qu'on voudrait lui faire jouer, est manifeste au dela des difficultes non moins manifestes pour l'apprehender.

En fait, son analyse semble faire l'objet d'une grande confusion et pose de plus en plus un veritable defi aux economistes et a l'analyse economique, ouvrant la voie au developpement de differentes conceptions. Les contre-coups de la crise et leur retombees sur les pays "des Tiers Mondes" en ont fait evoluer la vision et les analyses, meme si le terme est de plus en plus conteste. Certains proposent tout simplement de renoncer a cette notion alors que d'autres le considerent comme "au mieux une illusion et au pire une imposture".

A considerer les travaux des economistes qui se sont penches sur la question, l'ambiguite regne quant a l'origine de ce secteur et a sa dynamique, quant aux termes et aux definitions proposes et quant aux fonctions qu'il assure. Le debat sur ces questions a mobilise les chercheurstout au long de annees 1980. Souvent l'operationnel a envahit le champ theorique, brouillant la reflexion: ainsi, nous retrouvons d'un cote une multitude d'enquetes statistiques descriptives et empiriques et de l'autre une problematique dominante du secteur informel, aux faibles capacites analytiques.

Le secteur informel, notion "confuse et elastique", est assimile dans un premier temps, soit a un residu en voie d'absoption, au sous- emploi et au chomage, soit a des activites marginales ou encore a des activites de petite production dominees et soumises. Dans le sens commun, il est synonyme de pauvrete, d'activite de rue, d'absence de cadre reglementaire. Les organismes internationaux et les pouvoirs publics, quant a eux, apres l'avoir nie, redecouvrent ses vertus, le considerant comme la solution miracle a la crise de l'emploi.

Ces analyses, qu'elles soient d'inspiration evolutionniste, liberale ou marxiste, apprehendent la dynamique du "secteur informel'' quasi-exclusivement a travers ses fonctions economiques, comme un simple mouvement induit par le secteur capitaliste et par les impulsions externes d'ordres economiques. Ces recherches ont insiste sur l'aspect quantitatif (revenu, consommation, accumulation, lien avec le capital) et se rejoignent dans un cas comme dans l'autre dans la meme demarche economiciste. C'est a partir de ces considerations que nous nous proposons de consacrer ce travail a l'analyse de ce qui est appele activites informelles et les formes d'emploi non salariales qu'elles mettent en oeuvre dans les pays en developpement, au regard du cas marocain. Plus precisement, on s'interessera a la dynamique des micro-entreprises. Notre propos consistera a relativiser la contrainte exclusive des facteurs economiques (marche ou capital) et d'introduire dans l'analyse la dynamique des rapports sociaux et les logiques societales a l'oeuvre. Ainsi, notre objet d'etude vise a saisir le sens et la dynamique des activites informelles, au defa de leur fonctions. Cela suppose que l'analyse se situe a deux niveaux lies: celui des dynamiques
externes et celui des dynamiques intemes.

Le premier niveau renvoie au role joue par les impulsions externes: lien avec le capital, le regime d'accumulation et les incidences des politiques economiques qui n'ont pu developper qu'une "salarisation restreinte". Dans ce contexte, on ne peut nier l'existence d'une dynamique induite et dependante: c'est ce que nous tenterons de demontrer tout au long de la premiere partie. En particulier, il nous apparatt de premiere importance de porter la reflexion sur les liens entre la crise economique et financiere et !'extension des activites informelles. Cette reflexion tiendra compte a la fois des incidences et des confits sociaux de la crise et des politiques mises en place pour y faire face, d'un cote et  le changement d'attitude adopte a l'egard du SI, de l'autre.

Du premier point de vue, de toute evidence, la crise debouche sur une degradation des niveaux de vie et de l'emploi provoquant des ruptures, faisant basculer nombre d'actifs ainsi que des pans entiers de l'economie dans "l'informalite". Mais parralellement le retrait de l'Etat, qui a marque la grande majorite des pays du Sud, s'est souvent traduit par une redynamisation de la societe civile: mutation dans l'allocation et !'organisation du travail, invention de nouveaux rapports sociaux, qui s'appuient sur les anciennes formes d'organisations et les anciennes institutions.

Le deuxieme point de vue qui constitue un des elements fondant l'interet porte au secteur informel est celui du changement de position adopte a son egard par les organismes internationaux et les Etats depuis 1985. Ce secteur qui etait appele, selon certains a disparaitre, qui etait pendant longtemps ignore par l'Etat est desormais pris en exemple. Nous nous interrogerons sur les capacites de ce secteur a faire face a la crise de l'emploi et a jouer un role dans les strategies de developpement, d'une part et d'autre part sur la signification de ce changement d'attitude.

Plus precisement, l'analyse des activites informelles souleve la question de la place de l'economie et des limites de !'analyse economique. Dans nombre de travaux, la problematique du secteur informel s'est enfermee dans le champ economique. Est postulee ainsi, !'existence de mecanismes auto-regulateurs que c;a soit ceux du marche ou ceux du capitalisme. Le secteur n'existe que par reference aux fonctions remplies a l'egard de la partie formelle: produire des qualifications, distribuer des revenus, abaisser Jes salaires, constituer une armee de reserve ou transferer de la valeur. Or, cette perspective, selon nous, n'a mene qu' a approfondir la vision dichotomique' sectorielle, vision que nous rejetons et qui n'a ni fondement theorique ni fondement analytique. C'est l'une des idee qui traversent cette these.

Bien plus, et c'est un point fondamental que nous developperons, a ete quasiment occulte de !'analyse et de la recherche ( du moins pour les economistes liberaux) un probleme de fond, celui des logiques societales de ces pratiquesinformelles et, leur dynamique interne, bref tout ce qui est qualfie "d'exogene" a la sphere economique et qui pourtant leur donne sens.

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Références

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AGIER, M., COPANS, J. MORICE, A., "Le monde du travail africain: pluriels et ambiguites", dans classes ouvrieres d'Afrique noire, Kathala ORSTOM,1987.

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AKESBI, N. ET GUERRAOUI, D., Enjeux agricols: evaluation de !'experience marocaine, ed. le Fennec, 1991, 150 p.

ALAOUI, A., BERNARD, CH., BOUABID, A., "Au Maroc des microentreprises de production destinees a rester petites".dans Nouvelles logiques marchandes au Maghreb. CNRS,1991.

ALAOUI, A BOUABID, A, Pour une relecture de la problematique de !'industrialisation au Maroc: une tentative d'approche sur des bases empiriques. Memoire de maitrise sciences economiques. Universite de sciences sociales. Grenoble, 1987.

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juin 20, 2023

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